Ce que Vermeer peut t’apprendre pour tes photos
Faisons aujourd’hui un petit exercice d’analyse.
Je te propose de te poser…
Juste quelques instants…
Pour observer…
Contempler…
Décortiquer…
Cette peinture de Vermeer que nous connaissons tous.
Si je te propose de faire cela…
C’est parce que l’exercice est vraiment utile en soi.
En jouant le jeu…
Tu vas probablement te rendre compte de certaines choses.
Voyons désormais ensemble ce que…
De part sa composition…
La représentation de cette laitière peut nous apprendre.
1 – Concrètement, que voit-on ?
Ici…
L’image donne à voir une femme…
Habillée à l’ancienne…
Située dans une pièce en intérieur…
Qui est en train de verser un liquide…
Visiblement du lait…
Dans une jatte en terre cuite.
Cette dernière est posée sur une table recouverte d’une nappe…
Et sur lesquels sont disposés :
une corbeille avec une miche de pain
un tissu bleu
du pain en morceaux
une cruche ou un vase
Derrière le personnage…
Sont accrochés au mur…
Un panier en osier…
Et une cuve en cuivre.
Et au sol…
On peut apercevoir une chauffe-pied.
La vue de touts ces éléments assemblés nous permettent déjà de tirer quelques idées générales.
La scène se passe à l’époque du peintre (au 17e siècle donc).
Les vêtements de la femme et ce qu’elle est en train de faire (verser du lait dans une jatte)…
Semblent indiquer que c’est une servante.
Et donc qu’elle travaille probablement dans une maison bourgeoise…
Les ustensiles en cuivre…
Et surtout…
La faïence de Delft formant les plaintes du mur au sol…
En témoignent.
L’utilisation de tous ces éléments n’est pas anodin.
Car ils permettent de plonger le spectateur dans une ambiance.
De lui faire comprendre des choses…
Des interprétations…
De façon consciente ou inconsciente.
Mais pour que l’image est un réel impact…
Il s’agit ensuite de construire l’image afin de diriger au mieux le regard du spectateur…
Là où l’on souhaite qu’il regarde.
2 – La lumière
Pour cela…
La lumière est l’outil numéro 1 à travailler.
Tu le sais…
Sans lumière…
Pas d’image !
Ici…
Le personnage est situé à proximité d’une fenêtre donnant sur l’extérieur.
La douceur de la lumière laisse imaginer qu’il s’agit d’une lumière naturelle.
Cette fenêtre est placée à gauche de l’image…
Et vient directement se poser sur :
la laitière
la table
De façon plus large et plus diffuse…
Elle éclaire également le mur derrière la servante.
La lumière met donc en évidence l’action qui se passe dans la pièce.
A savoir le lait qui est versé.
Et la composition et l’agencement de l’image…
Semblent également aller dans ce sens-là.
3 – La composition (ou agencement des éléments entre eux)
3.1 – Les plans
Cette image présente 3 plans distincts :
1er plan : la table et notamment la corbeille avec le pain entier
2ème plan : la laitière et le pot de lait
3ème plan : le mur avec le panier et la cuve accrochés ainsi que le chauffe-pied posé au sol.
Ici…
Outre le fait d’habiller la scène…
Les différents plans permettent de donner une perspective à l’image.
Et donc de la profondeur.
Ce qui évite ainsi d’avoir une image trop plate.
De plus…
Cette mise en perspective permet finalement de mettre en avant l’action principale de l’image :
Encore une fois, le lait versé dans la jatte.
Autre chose…
Les plans jouent également un rôle dans l’équilibre des pleins et des vides de cette image.
3.2 – Les pleins et les vides
Ici…
Les pleins se situent dans la partie basse-gauche de l’image.
Tandis que les vides sont plutôt situés dans la partie haute-droite.
On remarque ici que les pleins sont en fait constitués par le 1er et le 2ème plans.
Alors que les vides sont davantage présents dans l’arrière-plan.
Le fait que ce dernier soit moins « chargé » permet clairement d’aérer l’image…
Et de laisser directement le regard du spectateur se focaliser sur l’action :
La laitière et plus particulièrement le lait versé dans la jatte.
D’ailleurs, à ce stade de l’analyse…
On peut se poser une question :
le sujet principal de l’image est-il vraiment la laitière ?
Ou le lait versé dans la jatte ?
Plusieurs éléments permettent de répondre à cette question…
Et notamment…
Le croisement des lignes de fuite.
3.3 – Les lignes et le point de fuite
Si l’on tient compte de trois lignes principales…
On se rend bien compte que l’action se situe au niveau du mouvement de la laitière.
Le schéma suivant en témoigne :
La laitière, debout…
Impose une verticalité à l’image (qui répond d’ailleurs à la verticalité de la fenêtre).
Située quasiment au centre de l’image…
Notre regard ne peut que se laisser tomber dessus dans un premier temps.
Celle-ci est ensuite contre-balancée par une perpendiculaire passant par l’arrête de la table et la rainure que la faïence crée avec le mur à l’arrière-plan…
Puis par une diagonale passant la corbeille avec le pain…
La cruche d’où sort le lait…
Et la tête de la servante.
Ces lignes forment ainsi un beau triangle rectangle dans lequel s’intègre l’action principale de l’image.
Allons maintenant un peu plus loin…
Si l’on suit d’autres lignes situées dans l’image…
On obtient un schéma de ce type-là :
Les lignes se croisent en un point :
La cruche d’où sort le lait.
A mon sens…
C’est précisément sur ce point là…
Et non sur la laitière en elle-même…
Que le peintre à souhaiter mettre l’accent…
Et diriger le regard du spectateur.
D’ailleurs…
Cela est même renforcé par la posture…
Et le regard de la laitière elle-même.
Sa tête légèrement penchée…
Son regard dirigé vers la jatte et ce qu’elle est en train de faire…
La posture de son corps…
Et la gestuelle de ses bras tendent également vers ce point-là.
Enfin, une dernière chose appuie cela encore davantage…
L’harmonie des couleurs.
4 – La couleur
Voici les tonalités que j’ai dégagé de cette image :
Il y a :
Des ocres avec le haut de la laitière, le pains, les paniers et la cuve en cuivre.
Des bleus avec la nappe, le tissu et la cruche posés sur la table, le tablier de la laitière et les dessins de la faïence de Delft.
Des roux rouges-orangés avec la cruche d’où sort le lait, la jatte dans laquelle est versé le lait, le carrelage du sol et la jupe de la laitière.
Des beiges avec le mur ainsi que le col et la coiffe de la laitière.
Ici…
Vermeer n’a utiliser que 4 couleurs dominantes.
Et elles se répondent.
Le jaune et le bleu sont des couleurs complémentaires.
Il est courant de les utiliser ensemble en image…
Car on est sur qu’elles fonctionnent bien ensemble.
De plus, le bleu est la couleur qui ressort le plus dans l’image.
Car il casse avec les trois autres qui sont des couleurs d’une même tonalité.
Et c’est probablement la raison pour laquelle…
Le peintre a ici entouré la cruche d’où sort le lait…
Qui est dans les tons rouges…
De textures bleues.
De cette manière…
L’action qui est mise en valeur…
Est encore le lait qui est versé.
Donc si on récapitule…
Voici ce que l’on observe :
Les accessoires, la façons dont est habillé le personnage et la pièce dans laquelle elle se trouve donnent des informations sur ll’histoire racontée par l’image, sur l’époque à laquelle elle se passe (17e siècle) et sur la condition sociale du personnage (c’est une servante)
La construction de l’image permet d’affirmer que le sujet principal de l’image n’est pas tant la laitière mais bien l’action qu’elle est en train de faire. Cela est souligné par :
– Le travail de la lumière
– la palette de couleur
– les lignes de fuite se croisant en un point point de fuite
– l’agencement des pleins et des vides
– les 3 plans de l’images
Tous ces éléments…
De façon directe ou indirecte…
Amènent le spectateur à se focaliser son attention sur un élément :
Le lait qui est versé dans la jatte.
Comme tu le vois…
Cette peinture est extrêmement bien réfléchie.
Construite avec minuties et précision.
Tous les éléments se répondent.
Et cela contribue grandement à l’harmonisation de l’ensemble.
Alors bien sûr…
Pour réaliser tes propres photos…
Pour composer tes images…
Tu n’es pas obligé de suivre à la lettre tous ces éléments.
Tu peux en choisir quelques uns dans un premier temps.
Et jouer avec pour t’entraîner.
Mais il est tout de même intéressant…
Voire nécessaire…
De prendre conscience des outils qui peuvent nous aider à améliorer nos images.
Cette peinture date d’environ 1658…
Et les techniques de composition utilisées ici sont encore valables aujourd’hui.
Et elle le seront toujours.
Car elles fonctionnent.
C’est une base !
Dès que tu tombes sur une images qui te plaît…
Qui te touche…
Je t’invite donc à refaire cette exercice afin d’en extraire des grands principes qui pourraient t’aider dans tes créations.
Car tu le sais…
Le temps et l’entraînement sont les clés de la réussite…
Mais ils ne dépendent que de toi.